Dans la Bibliothèque Nationale de Suède se trouve un livre unique et légendaire. Haut de 92 cm pour un poids de 75 kg, c’est le plus grand des manuscrits existants. Considéré comme la 8ème merveille du monde durant le moyen-âge, ses dimensions lui valurent le nom de Codex Gigas (livre géant), mais il est également connu sous une appellation plus mystérieuse : la Bible du Diable.
Créé au début du XIIIème siècle dans le couvent de Podlazice en Bohême (actuelle république Tchèque), le Codex Gigas est composé de 312 pages de parchemin qui nécessitèrent la peau d’environ 160 bêtes. Il contient différents textes écrits en latin parmi lesquels on peut trouver l’Ancien et le Nouveau Testament, des documents historiques tels que la Chronique de Kosmas, diverses formules incantatoires, ou encore un calendrier nécrologique.
L’une des caractéristiques étonnantes du Codex Gigas, mis à part sa taille, c’est la régularité de la calligraphie qui recouvre chacune de ses pages. Normalement, l’écriture varie au fil d’un manuscrit, que ce soit à cause de la fatigue ou parce que différents scribes se relaient. Mais ici, le style et l’application ne changent pas. On estime que l’ouvrage serait le travail d’un seul homme qui aurait œuvré durant plus de 20 ans.
L’autre particularité du Codex, c’est une enluminure qu’on trouve à la page 290 : elle représente un Diable de plus de 50 cm de haut, griffu et cornu, qui trône seul sur le parchemin. De par l’importance qu’elle donne au démon, cette illustration est très inhabituelle pour l’époque, et peut-être unique dans un manuscrit religieux. C’est cette image qui donna au Codex Gigas son surnom de Bible du Diable, et qui alimenta la légende de sa création : on dit qu’un moine du couvent de Podlazice fut condamné à être emmuré vivant. Pour échapper à cette sentence, il jura d’écrire en une nuit le plus grand livre du monde. Mais quand minuit arriva, et qu’il comprit qu’il ne finirait pas à temps, le moine implora l’aide du démon. Pour remercier ce dernier, il ajouta la fameuse illustration.
Au fil des siècles et des conflits, le Codex Gigas changea plusieurs fois de propriétaire. Après avoir été conservé dans différents monastères, il fut amené à Prague en 1594 pour rejoindre les collections de l’empereur Rodolphe II. Mais en 1648, suite au sac de Prague, l’armée Suédoise emporta le Codex parmi ses différents trésors de guerre. Il fut conservé à la Bibliothèque Royale de Stockholm jusqu’ au 24 septembre 2007, date à laquelle le gouvernement suédois rendit exceptionnellement le livre à la ville de Prague… pour une durée de 4 mois. Lors du transfert, qui réclama un an de préparation, le manuscrit fut assuré pour 10 millions d’euros.
Aujourd’hui, une version entièrement numérisée du Codex Gigas est librement accessible sur le site de la Bibliothèque Nationale de Suède. A la page 290, on peut toujours y voir le Diable, qui arbore la même grimace menaçante depuis 800 ans…
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